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poésies sanscrites la défaite momentanée du Bien par le Mal et son triomphe à venir. » Il traduit, en ses nuances, un optimisme humanitaire et combatif qui s’accuse vigoureusement en ses articles de propagande politique.

Ainsi, parallèlement, Leconte de Lisle se passionne pour la politique et la pure poésie : ceci établit la coexistence des deux besoins de sa nature, des deux réelles tendances de son tempérament[1]. C’est à la même époque qu’il affirme avec plus de carrure que jamais sa foi républicaine, qu’il précise ses espérances révolutionnaires, qu’il développe ses théories socialistes, qu’en la Vénus de Milo il proclame un culte idéaliste, entier, absolu, de la beauté.

Même ardeur et à la fois même sérénité dans ses deux religions. Telle sérénité même que les lecteurs de ses poèmes, plus tard, la qualifieront d’impassibilité. En ses articles, la constance des convictions solidifiait le flot débordant des généreux enthousiasmes. On les dirait d’un contemporain de la Convention si la flamme des sentiments n’en était

  1. « Cependant, ne pouvant plus vivre à Saint-Denis, Leconte de Lisle avait obtenu de ses parents une pension qui lui permit de s’enrôler seulement en seconde ligne sous la bannière de la Démocratie Pacifique ; il limita sa collaboration à la critique littéraire pour laquelle il n’eut à s’inspirer que de l’esprit libéral et des principes généraux du journal. Il publia dans la Phalange des vers, quelques nouvelles écrites dans le sentiment de Bernardin de Saint-Pierre » (Calmettes). Le malheur est que sa collaboration ne « se limite » pas à la critique littéraire ; il ne publie pas que des vers ou des essais, voire de la critique dramatique, il y écrit encore des articles de propagande politique ; il importe donc de compter avec les dates : Leconte de Lisle ne commence point par des essais politiques pour se consacrer exclusivement, après la désillusion, à la littérature, avec une ardeur d’autant plus grande.