Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/196

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

blante tentation de liberté, par l’amour « de l’humanité égarée et pervertie » et l’apologie du travail dispensateur de félicité, par le sentiment de l’amour et de la femme, par l’enthousiasme pour la jeunesse qui est une force divine, par le son mélancolique des rires, par la situation romanesque des personnages, fils de nobles et de bohémiennes (Marcie), par le feu diabolique des passions (Dianora)[1], l’ardeur romantique des âmes et la couleur des visages, par le sens de l’amour qui est « un cours d’analyse universelle », par le sentiment unitaire de l’art. Ces nouvelles, poèmes de la jeunesse et de l’enfance qui se prolonge en elle, sont en leur ensemble une protestation d’idéalisme contre un siècle mercantile.

Dans le Songe d’Hermann éclatent des accents au timbre desquels se révèle son propre état d’âme à cette époque :


« Vois-tu frère Hermann, il faut entrer dans la vie sociale et se faire place à la blafarde lueur des quinquets enfumés de la rampe, sur ce vaste théâtre où grimace la divine humanité. Ah ! ah ! j’étudie mon rôle, moi, je commence à rire assez agréablement de la Beauté, de Dieu, que sais-je ? Il est bon de comprendre son siècle. Que faut-il pour cela ? se prosterner devant un écu et salir une sainte admiration de la Justice et de la Beauté éternelles par cette maxime stupide : « Tout cela est bel « et bon, mais il faut manger pour vivre. »

Et Hermann : « Quoi ! Siège ! la beauté, n’est-elle donc pas ? Ces aspirations qui m’entraînent à elle, ce désir de justice et d’harmonie qui brûle mon cœur,

  1. Létia précède les héroïnes de Barbey d’Aurevilly.