Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’Élysée et l’Éden, les anges et les dieux,
Et, féconde, aux chaleurs d’un éternel solstice,
L’harmonie et Vamour, la gloire et la justice !


Il importe de s’en référer au sens de cet éloge afin de bien comprendre comment Leconte de Lisle fut induit à toujours chanter l’harmonie et la félicité de la Grèce. Son éternelle nostalgie de la Grèce ne s’adressa point tant à la vraie Grèce classique qu’à une Grèce infiniment ennoblie et magnifiée par un vivant idéal socialiste. L’hellénisme de Leconte de Lisle n’apparaît que comme une application, une cristallisation, une incarnation esthétique d’une imagination primitiviste et humanitaire.

Dans Tantale, le poète interpelle le vulgaire qui est sourd, même hostile à ceux qui veulent le délivrer de la condition misérable à quoi le condamne la société actuelle. Il lui reproche son ignorance maudite, mais bientôt, se détachant du désespérant tableau de l’état actuel, il s’élève en une invocation : Un jour, dit-il, tu finiras tout de même par posséder le bonheur ; encore marqué des stigmates de la présente condition avilissante, tu plongeras enfin dans la vie heureuse que tu méconnus :


Vulgaire ! un jour viendra, que tout grand cœur devine,
Où, puisant au cristal de la source divine,
Et décernant au Maître un immortel honneur,
Tu renaîtras au monde ivre de ton bonheur !
Cette aube à l’horizon montera plus dorée
Que l’aurore polaire aux palais de Borée,
Et ta lèvre rougie aux morsures du feu.
Plongera, frémissante, en la fraîcheur de Dieu.


L’Églogue harmonienne montre le poète hési-