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Entre l’homme et la terre une amitié sacrée !


Hélène substituait à l’idéal passé de la beauté antique l’idéal futur de l’amour universel, exhortant l’art, le poète, à bâtir avec de la beauté les cités de félicité à venir. Architecture recule en l’ombre grise d’un passé faux et inutile tous les monuments des siècles de foi odieuse et torturante et de féodalité inique, recule en l’ombre de vieillesse et de mensonge l’art gothique, pour ériger en la lumière des horizons justes ce qui doit être les monuments, les temples de la société future, les cathédrales de la religion du Bien et du Beau :


Non ! monuments noircis par tant de siècles, non !
Je ne vous maudis pas en haine de son nom ;
Je ne veux pas briser d’un bras antipathique
Le trèfle sarrasin dans l’ogive gothique,
Ni déchirer si tôt le tissu gracieux
Du granit dentelé qui flotte dans les cieux.
Monte! épanouis-toi, cathédrale frivole !
Paisible, dors là-haut où la tempête vole !
Dors, rêve de ta gloire et des jours oubliés
Où les peuples vers toi couraient multiphés.
Tu ne vaux point, hochet d’un labeur séculaire,
Qu’on sue à t’ébranler de ta pierre angulaire.
Ô murs de Babylone ! ô temples vermoulus
Dont le sens est futile et ne nous suffit plus !


Le poète civique ne demande pas qu’on rase ces monuments ; qu’on les conserve. Mais il déplore le mauvais goût et l’ignorance de ceux qui veulent les restaurer, « copier de travers l’œuvre à la mort vouée ». Il préférerait encore que les « amants du badigeon », « les bourgeois » dans leur furie et leur vengeance stupide d’esprits forts abattissent « ces palais caducs » et ces « forteresses », mais à