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LECONTE DE LISLE

ciront, qui détachèrent davantage son esprit du monde pour le rattacher plus étroitement et plus complexement à la nature, tour à tour âpre et fluide, dont il sera pénétré dans les intempéries et par les beaux jours cristallins de la Bretagne. La mobilité de son esprit se subordonnera à celle du ciel qui contient son équilibre éternel et son instable sérénité. Il montrait déjà dans ses épanchements avec ses amis, une âme tendre, grave et pudique, traitant avec grandeur et délicatesse des sujets de la vie dont les étudiants délibèrent en général avec jorivoiserie et impertinence : les privations tremperont cette austérité comme elles assouplirent, en raffermissant, cette fierté qui se redresse plus altière pour les actes de soumission. Acceptée avec la hauteur d’un caractère extrême et digne, rien ne saurait mieux convenir que la misère, en vous sevrant des discours assurés par le soin des parents, pour vous donner de la vie le goût substantiel, un sobre appétit, et, par celui-ci, la jouissance pure de l’action comme de la contemplation avec une lucide compréhension de l’existence. Le jeune homme, loin de renoncer à son idéal, s’y consacre avec une plus énergique humilité et la conscience de tout son effort.

Il travaille : c’est justement en septembre qu’il est reçu bachelier en droit. Ses parents songent déjà à le faire rentrer à Bourbon comme substitut, procureur du roi ou juge auditeur quand il aura passé sa licence. Mais lui, à peine bachelier en droit, se demande s’il ne suivra pas les cours de la Faculté de médecine. Au fond, il paraît qu’il a