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LES DÉBUTS DANS LA LITTÉRATURE

tanée. Ses trois grands poètes préférés sont : Lamartine, Hugo, Barbier.


Lamartine, » grand par le sentiment comme par la forme», mais sur lequel cependant il fait déjà des réserves :


Je me suis décidé enfin à lire Jocelyn ; je vous avoue que ça n’a pas été sans peine. Je savais M. de Lamartine très capable, sans nul doute, de rendre avec vérité une existence aussi remplie de poésie par elle-même ; mais je me doutais aussi qu’il sacrifierait souvent la douce et gracieuse peinture que comportait un tel sujet au vague prétentieux qui abonde dans ses plus beaux ouvrages. Il y a des morceaux charmants dans Jocelyn, des pages magnifiques de haute poésie. La peinture de la nuit, à la Grotte aux Aigles, est vraiment sublime ; et l’on rencontre des pièces exquises de sentiments et d’intimes douleurs ; mais aussi, vous avouerez qu’il y a bien des longueurs qui affadissent de beaucoup le charmant et incorrect ouvrage.


Pour Hugo son admiration est entière : c’est le « génie régénérateur » et, fréquemment, à toute occasion, dans la Variété, il accréditera son nom dans le milieu breton.

Quant à Barbier, ce n’est certes pas la perfection de la forme qui le lui fait saluer un des plus ; grands poètes de France, mais encore la violence et la franchise du sentiment, en particulier sa révolte contre le siècle bourgeois, avec le ferme espoir en un âge meilleur :


Toujours, ô mon Rosa, toujours des vents contraires
Ne déchireront pas la voile de nos frères
… Les douceurs du printemps après le vent d’hiver.