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LES DÉBUTS DANS LA LITTÉRATURE

         Ta lumière fit Raphaël.
Pétrarque, Rossini, Raphaël ! ô poètes,
La terre tressaillit quand l’Harmonie en pleurs
Épancha trois rayons dont pour vous furent faites
Vos âmes…


Le propre des esprits vierges et larges est de tendre ainsi à grouper au lieu de diviser, à synthétiser au lieu de classifier. C’est ici, dans la critique, l’effet de cet instinct d’abstraction ou de généralisation qui, en amour, créait l’amour platonique et qui dans la poésie, d’ici quelques années, au lieu de tableaux anecdotiques et détachés, inspirera des visions d’ensemble des différents âges de l’humanité, concourant à composer une fresque collective des peuples.

Il rattache le musicien Meyerbeer au sculpteur Michel-Ange :


           Fier et sombre génie,
Mélange de splendeur, d’audace et d’ironie,
            Roi du pinceau de fer.


Il ne craint pas de réunir et de confondre


Masaccio, Weber, Corrège et Lamartine !
Car votre esprit est frère'[1].


concevant l’art avec le sens de la parenté, de la « fraternité » des esprits humains.

Aussi, dans la Variété, transportant en art le principe de solidarité humaine, compose-t-il des esquisses de littérature comparée : elles permet-

  1. Plus tard se formulera la théorie baudelairienne des Correspondances, où le poète, dans un même esprit, apparente Weber à
    Delacroix.