Au premier abord, aucun doute possible. Deux femmes ne donnent pas cette même impression de beauté spéciale, n’ont pas ce même regard clair, et cette même pâleur, et cette même allure. Mais des cheveux blonds, couleur de paille, légers et bouclés, enlevaient à la physionomie tout le côté pathétique qui s’associait, dans le souvenir de Victor, à des cheveux couleur fauve.
Dès lors, il fut moins sûr. Deux fois, il revint sans retrouver l’absolue certitude que lui avait imposée le premier choc. Mais, d’autre part, cette expression pathétique enregistrée la nuit, à Garches, ne provenait-elle pas des circonstances, du crime commis, du danger couru, de l’épouvante ?
Il fit venir l’amie d’Élise Masson.
« Oui, dit-elle aussitôt, c’est la dame que j’ai vue avec Élise, dans son automobile… oui, je crois bien que c’est elle… »
Deux jours plus tard, un voyageur arrivait au Cambridge. Il inscrivait sur la feuille d’identité qu’on lui présenta : Marcos Avisto — soixante-deux ans — venant du Pérou.
Nul n’aurait pu reconnaître, dans ce monsieur respectable, extrêmement distingué, vêtu avec une sobre recherche, le policier Victor, de la Brigade mondaine, si raide en son veston d’adjudant retraité, et à l’air si peu engageant. Dix ans de plus. Des cheveux tout blancs. L’air aimable de quelqu’un pour qui la vie n’a que faveurs et privilèges.