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Elle s’insurgeait contre ces théories. Elle se croyait indignée. Elle l’était peut-être. Mais, malgré tout, cela s’infiltrait en elle, vivifiait dans son cerveau des cases endormies d’où rayonnaient des rêves qu’elle ne s’expliquait point. Son parrain bénéficiait de l’honorabilité qu’elle lui avait supposée jusqu’ici. Il gardait un prestige inaltérable et ses paroles prenaient une importance décisive. Elle le grondait, puis redevenant câline :

— Allons, encore une histoire ? Votre dernière passion ?

Les après-midi, au Casino, assise sur la terrasse, avec sa mère et Mme  Bouju-Gavart, elle appréciait d’un coup d’œil les promeneurs qui arpentaient l’asphalte. Aucun n’échappait à ses accusations perspicaces. Pour les femmes, surtout celles que flanquait un cavalier, elle était inexorable. Les maris trompés — et tous devaient l’être — déterminaient chez elle une hilarité choquante.

Deux ou trois jours par semaine, Robert venait se reposer. Lucie se montrait fort aimable. Elle éprouvait une joie singulière à revêtir devant lui le costume de bain en forme de sac qu’il affectionnait, ainsi qu’à s’occuper de l’enfant sans relâche, comme si c’était son habitude quotidienne.

Au retour de Dieppe, les Bouju-Gavart invi-