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vitrine, fit des emplettes et détaillait le visage des commis qui la servaient.

Enfin, Robert ayant conduit ces dames et l’enfant au bord de la mer, elle recommença ses promenades avec « parrain ».

Elles furent longtemps moroses, M. Bouju-Gavart ne se départissant pas de sa réserve. Irritée, elle usa de coquetterie. Elle minaudait, le taquinait, et, s’autorisant de leur différence d’âge, s’asseyait sur ses genoux devant Mme Bouju-Gavart.

Elle n’aurait pu dire le but de ses efforts. Elle profitait de la diversion que le hasard fournissait à son désœuvrement, sans même soupçonner l’inconséquence de ses actes. Le mystère de l’amour l’attirait. Cet homme l’aimait-il vraiment ? Était-elle la source d’ivresses affolantes et d’angoisses cruelles ? Elle l’interrogeait de ses yeux avides. Mais il demeurait impénétrable.

Elle acheta clandestinement un costume de bain. Robert ne lui permettant qu’une espèce de sac très ample, pourvu d’une large jupe, et qui l’emprisonnait des chevilles aux poignets. Et un matin, de bonne heure, elle se baigna devant parrain, moulée dans un maillot noir. L’étoffe collait à la chair comme une seconde peau. Les jambes, les bras, les épaules émergeaient de cette gaine sombre, étincelants de blancheur. Aucune ligne n’était interrompue,