Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rer son rôle, afin de provoquer les éloges que méritent l’abnégation et la persévérance. Mais aussi sa maternité s’exaspérait dans cette lutte contre la grande ennemie. Une imprudence pouvait tout compromettre. Cette menace continue la tenait en haleine.

Quand le petit devint de tempérament plus résistant, la passion de la mère, moins fréquemment à l’épreuve, se modéra. Elle eut la chance de découvrir une bonne dévouée. Dès lors, sa vigilance put se relâcher. Son cerveau ne se concentra plus sur un unique souci. Une à une, des pensées étrangères l’envahirent.

Il ne s’effectua pas de rapprochement entre elle et son mari. Durant cette longue période où des soins particuliers les avaient distraits de leur affection, une fissure imperceptible s’était produite par où leur intimité perdait son charme.

L’admiration de Lucie pour la faconde de son mari n’avait reçu nulle atteinte. L’attachement de Chalmin ne diminuait pas. Mais le temps désenlaçait leurs âmes que jamais, d’ailleurs, un amour fort n’avait unies bien étroitement. Après cette grossesse où leurs lèvres s’étaient déshabituées des baisers éperdus, ils n’éprouvaient pas cette crise de désirs qui jette souvent les jeunes époux aux bras l’un de l’autre. Ils espacèrent leurs caresses. Somme toute, il n’y eut ni querelle, ni aigreur,