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chait les reins. Le poids des couvertures était intolérable. L’effort pour tousser ou éternuer la martyrisait.

Elle se remémorait aussi les affres d’une soif aride et d’une faim vorace qu’une gorgée de bouillon assouvissait, et le gonflement monstrueux de son ventre, et ses joues creuses, ses yeux caves, son nez amoindri.

Une fois ayant surpris le mot « pleurésie » articulé près d’elle, elle se disait très calmement : « Je vais mourir. » Cependant, l’épouvantable douleur s’apaisait comme par miracle. Mais une autre, moins forte, lui comprimait la poitrine. Elle étouffait.

Et les interminables mois commencèrent d’une convalescence fastidieuse. Chaque période d’amélioration aboutissait à une période de malaise, à l’une de ces infinies misères sexuelles de la femme, blessée au plus intime de son être. Des semaines entières, elle restait dans son lit, couchée, immobile comme un cadavre, comptant les moulures de la corniche, au plafond.

À ce moment, plus encore qu’au début de la maladie où le dévouement était naturel, elle constata l’affection inquiète de son mari. Il s’asseyait en soupirant :

— Je n’ai rien à faire, aujourd’hui ; si tu le permets, je te tiendrai compagnie.

Durant toute une journée, il ne bougeait pas,