Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/312

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ou deux semaines. Plus tard, de grands ménagements seraient indispensables.

— Je vous obéirai, docteur, promit-elle, j’ai si hâte de me remettre.

Huit jours après, Chalmin, réclamé par ses affaires, boucla sa valise. Ce départ affligea Lucie. Elle gémit :

— Comme je vais m’ennuyer sans toi !

Ces mots le ravirent. L’état critique de sa femme avait opéré entre eux un rapprochement dont il savourait les manifestations.

Elle le fit approcher et tout bas :

— C’est la première fois que nous serons séparés si longtemps, tu seras sage ?

Il pouffa de rire. Elle eut une moue comique :

— Ah ! je ne t’en voudrais pas, ce n’est pas drôle une femme comme moi, à ton âge. Mais, vois-tu, je serais trop malheureuse si j’apprenais que tu m’as trompée.

Elle disait cela sincèrement, avec une angoisse réelle, du plus profond de son âme effrayée d’une telle perspective.

La fin de l’automne s’écoula dans l’isolement et la tranquillité. Le temps fut favorable. Dès le matin, Lucie se transportait sur le balcon. Elle y déjeunait et ne s’enfermait qu’au coucher du soleil. Mme  Ramel menait l’enfant à un pensionnat, puis accomplissait ses dévotions. Et Lucie demeurait seule.