Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/283

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Lucette, ma petite Lucette, vrai, je ne te vois pas me trompant.

— Mais si tu me trompes ?

Il avait si peur qu’un injuste soupçon la fît souffrir qu’il répondait d’un ton solennel :

— Dicte-moi le serment qui te plaira, Lucie, et je jurerai que je suis digne de toi.

Jamais, lui, le doute ne le hantait. La façon dont il jugeait sa femme était ancrée en son cerveau comme une idée fixe ; seul pouvait la détruire le témoignage de ses yeux. Il la voyait encore ainsi qu’il se l’était, dès le début, représentée, sans examen sérieux, avec les faibles renseignements que lui fournissait son esprit peu scrutateur. Il n’avait pas songé, depuis son mariage, à réformer son appréciation, ni même à la contrôler.

Lucie, d’ailleurs, ne se départissait jamais envers lui de la prudence la plus rigoureuse. Connaissant sa ponctualité et ses habitudes méthodiques, elle s’arrangeait en sorte qu’il la retrouvât toujours en peignoir et en pantoufles, un ouvrage à la main. Un accueil sans cesse aimable et des effusions habilement espacées, le maintenaient dans son incurable aveuglement.

À cette époque, la sœur de Robert, Mme  Vatinel, mariée à Lisieux, envoya son fils Louis finir ses classes au lycée Corneille. C’était un enfant timide, rougissant. Son uniforme de collégien