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On donna de grands dîners dont les invités prisèrent la belle ordonnance, les mets et les vins. Une loterie aux enchères, composée de lots charmants, les terminait. Lucie présidait en mondaine consommée. L’opinion était unanime. Aucune femme de son âge n’alliait autant de simplicité à des manières plus affables. Dans un petit conciliabule entre vieilles dames, Mme  Lassalle trouva la note juste :

— Elle reçoit ainsi que nous savions recevoir.

Parmi les hommes que Robert attirait chez lui, Lucie remarqua surtout un nouveau venu. Armand Boutron était un gros garçon, robuste, d’âme simple et de tempérament sanguin. Il avait fait la guerre en compagnie de Chalmin, puis s’était fixé en Algérie. L’ennui l’en chassa. Il habitait maintenant Darnétal, où il s’occupait d’élevage et de grande culture. Il avait voué à Robert une affection inaltérable, l’ayant protégé, durant la Commune, contre les attaques d’un fédéré. Comme toutes les femmes, Lucie l’effarouchait. Il la traitait cérémonieusement.

Cette circonspection la stimula. Elle fut coquette. Armand s’en aperçut. Craignant de troubler l’union sereine de ce couple par la sympathie trop forte que lui manifestait, inconsciemment sans aucun doute, la femme de son ami, il montra une prudence maladroite.

Piquée au jeu, Lucie reprit ses exercices de