Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/189

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tations, elle concluait qu’on doit le traiter avec rudesse. L’indifférence le mate. Il faut le plier aux caprices les plus fantasques et l’asservir comme un être inférieur, prêt à toutes les lâchetés.

Cette théorie, elle l’appliquait à tort et à travers, quand elle s’en souvenait. Tel jour, elle eut un retard exagéré. Tel autre, elle se refusa. Elle modifia l’apparence de son humeur, d’ordinaire égale. Elle restait muette, sombre, énigmatique, puis le lendemain riait, d’un rire nerveux : « Je les affole », se disait-elle. Elle les lassait plutôt. Lemercier surtout aspirait à la saison des bains comme à une délivrance méritée.

Elle continuait ses visites à Mme Bouju-Gavart, la société de sa vieille amie lui plaisant toujours. Elle s’abreuvait de ses maximes et de ses sermons avec la même soif ardente. Le vice l’emplissait d’une horreur vertueuse. Pour montrer la ténacité de son zèle, elle confessait un tas de péchés. Quant à ses rapports avec parrain, elle n’y songeait jamais auprès de Mme Bouju-Gavart, s’évitant ainsi des remords importuns.

Le 1er août, on partit pour Dieppe. Lemercier promit d’y faire maintes apparitions. Mais il ne vint pas. Mme Chalmin écrivit, ne reçut aucune réponse, et n’y pensa plus.

Au bord de la mer, Lucie subit cette crise d’indolence, où les femmes vivent d’une vie