Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.

derez, Madame ; vos volontés les plus sévères, je les exécuterai fidèlement, je ne redoute pas le châtiment, j’ai tant à expier !

Ce nouveau rôle l’exaltait, et pour prouver sans retard l’ardeur de son zèle, à son tour elle débita sa confession. La mine contrite, elle dit le nombre de ses chutes, la date où elle avait rencontré Amédée Richard, sa promenade au jardin de l’Hôtel de Ville. Mais sa franchise n’alla pas plus loin. Graduellement, inconsciemment, elle dérailla, s’éloigna de la réalité. Elle ne consentait pas à raconter de si piètres liaisons. Reniant donc Amédée, elle termina l’aventure avant le dénouement et n’en fit qu’une incartade regrettable. L’histoire du comte de Saint-Leu était prête. Elle s’en servit. Quand sa mémoire la trompait, elle créait d’autres épisodes.

— J’ai opposé, Madame, une résistance terrible, des mois je me suis refusée, la passion m’a vaincue. Quels remords m’ont déchirée !

Elle glissa rapidement sur le docteur Danègre — un des premiers chirurgiens de Paris, qui tous les deux jours lâchait sa clientèle et s’enfermait à Rouen dans un appartement luxueusement meublé — et sur Markoff qu’elle costuma en une espèce de boyard conquis à Dieppe. Elle brûlait d’en arriver à parrain, quoique ignorant ce qu’elle imaginerait.

Mais tout naturellement, les mensonges