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nouveaux de vérité, il se confina chez lui, étudiant des moyens d’agir qu’il rejetait à mesure, attendant des nouvelles, doutant de lui-même, torturé, angoissé, malheureux comme il ne l’avait jamais été.

Trois jours passèrent ainsi, interminables et enfiévrants. Le matin du quatrième jour, le timbre à la grille de l’avenue de Saïgon retentit. Velmont courut vers la fenêtre. Un enfant sonnait à coups redoublés. Velmont se précipita vers le perron et le jardin. Dans l’avenue, une auto arrivait à toute vitesse. Cette auto freina brusquement devant le pavillon. Un homme sauta à terre, s’empara de l’enfant et l’emporta dans la voiture, qui démarra sur-le-champ. L’incident n’avait pas duré vingt secondes. Velmont n’avait pas eu le temps matériel d’intervenir. Il ouvrit la grille et vit s’éloigner et disparaître dans l’avenue déserte un cabriolet à caisse orange, — la voiture de Maffiano.

Velmont revint au pavillon et se trouva en présence de Victoire, que le repos avait rétablie et qui accourait, alarmée par les coups de sonnette.

« File à la Maison-Rouge, ordonna-t-il, convoque vingt de nos hommes, les meilleurs, et qu’on organise là-bas un véritable camp fortifié, où personne ne puisse s’introduire. La nuit, en permanence, trois de nos chiens bergers, les plus féroces. Mots de passe, rondes nocturnes, surveillance incessante, bref une discipline de fer. Et tiens-toi prête à tout événement. Je t’amènerai peut-être quelqu’un sur qui il faudra veiller comme sur la prunelle de tes yeux.

« Adieu. Pivote et débrouille-toi. Non : pas d’observations, pas de questions, pas de discours. C’est ma vie qui est en jeu. Et tu sais si j’y tiens ! Va ! »

Retranché lui-même dans le pavillon d’Auteuil, Horace Velmont prit pour sa personnelle sûreté toutes les mesures nécessaires…

Précautions inutiles, tout au moins pendant les douze premières journées. Il ne se produisit rien… Rien que ces menus faits qui prouvaient à Velmont que l’ennemi, malgré toute vigilance, malgré toute garde, s’introduisait chez lui à toute heure du jour et de la nuit, allait, venait, épiait, se tenait au courant, par le détail, de toute son existence. Il sentait flotter autour de lui l’invisible présence de vivants fantômes. Par moment, il se demandait s’il ne rêvait pas. Mais non : « on » venait chez lui. Le pavillon semblait hanté… En