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de la rencontre. Je ne te lâche plus, ma belle ! Non, pas la peine de te débattre ! »

Bien qu’elle ne pût reconnaître ni la voix, ni la silhouette de son agresseur, la jeune femme fut persuadée que c’était celui qu’on appelait « Le Sauvage », « The Rough », l’homme qui, l’après-midi déjà, l’avait assaillie dans l’escalier de Allo-Police. Elle tenta de se dégager, mais la main qui l’étreignait semblait une main de fer. L’homme reprit, railleur et menaçant :

« Puisque l’occasion s’en présente, je t’avertis, ma petite, que tu t’engages sur une mauvaise route, prends garde ! Voilà que tu fais de l’espionnage, maintenant ! Au compte de qui ? Pour l’amour de qui ? Du vieux Allermy ! Tonnerre, après le fils, le père, alors ? Ça ne sort pas de la famille ! Écoute bien, ma jolie : si tu souffles un mot de ce que tu as pu surprendre ce soir, tu es perdue ! Oui, perdue ! toi et ton petit Rodolphe ! Ce cher enfant, il y passera, je te le jure ! Alors, silence, hein ! Ne t’occupe pas de nos affaires, si tu ne veux pas qu’on s’occupe des tiennes ! C’est compris, hein ? Et pour sceller le pacte, un baiser, ma jolie ! Un seul, mais un vrai baiser d’amour ! »

Il resserrait son étreinte, tâchait d’atteindre la bouche qui se dérobait. La lutte de l’après-midi recommençait. Patricia se débattait, éperdue, n’osant crier, dans la peur d’être étranglée par le « Sauvage » qui grondait :

« T’es trop bête ! Un baiser, et je te mets aussi dans l’entreprise : beaucoup d’argent à gagner, je te le répète ! Beaucoup d’argent ! De quoi faire de ton Rodolphe un duc, un prince, un roi ! Et tu refuses ? Tu crois donc arriver en travaillant avec Mac Allermy ? Idiote, va ! Ah ! sale bête !… »

De ses ongles aigus, comme une chatte en colère, elle l’avait griffé de toutes ses forces. Il avait la figure en sang. Il appela :

« Albert, un coup de main, vieux garçon ! »

Un homme vêtu en matelot, un colosse haut de