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La vieille nourrice dégringola l’escalier et apparut tout émue.

« Me voilà ! Qu’est-ce que tu veux, mon petit ?

— Je ne t’ai pas appelée.

— Tu as crié : Victoire » !

— Tu veux dire que j’ai chanté victoire. Ma pauvre vieille, ce que tu es embêtante avec ton nom !

— Appelle-moi autrement.

— C’est ça : je préciserai le haut fait ! Veux-tu ? Les Thermopyles ? Tolbiac ?

— Tu ne pourrais pas me choisir un nom chrétien ?

— Un nom d’héroïne victorieuse ? Tiens, Jeanne d’Arc ? Ça t’irait comme un gant. Bon, voilà que tu fais la tête ? Tu as tort, je n’ai pas voulu t’outrager. Mais, rassure-toi, je te trouverai autre chose sans le chercher. D’abord, écoute mes prouesses. »

Il raconta l’exploit, en riant comme un collégien.

« Est-ce rigolo, hein, ma vieille ? Il y a des années que je ne m’étais autant amusé. Et puis quelles perspectives pour mes luttes futures avec la police ! Je vais apprivoiser un éléphant, un crocodile, et un serpent à sonnettes. On me fichera peut-être la paix alors. Et quelle économie quand je renouvellerai mes alliés ! J’aurai des provisions d’ivoire, de la peau de crocodile pour mes chaussures, et des sonnettes pour mes portes. Maintenant, donne-moi quelque chose à manger et mets-moi un pansement !

— Tu es blessé ? demanda Victoire, pleine d’alarme.

— Ce n’est rien. Une égratignure. J’ai perdu un peu de sang, mais, pour Lupin, ce n’est rien et ça évite les congestions possibles. Allons, presto, il va falloir que je reparte dare-dare !

— Mais où veux-tu aller maintenant ?

— Chercher mes sous ! »

Après un pansement rapide de sa blessure qui était sans gravité, et un léger repas, plus rapide encore, Arsène Lupin se reposa une heure et, frais et dispos, commanda qu’on sortît du garage son auto no 2, ainsi que la no 3. Accompagné de Patricia, il monta dans la première, et quatre de ses hommes, choisis parmi les plus robustes et les plus déterminés, prirent place dans la seconde.

« Nous retournons chez ce vieil Angelmann,