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Horace bondit vers la tente voisine. Maffiano et ses hommes n’y étaient plus. Sans perdre de temps, il courut jusqu’à Maison-Rouge chercher de l’assistance.

Dans le vestibule de la maison, il rencontra Victoire qui sortait pour une inspection matinale.

« Ils l’ont tuée », lui dit-il, les larmes aux yeux.

Victoire demanda naïvement :

« Et elle est morte ? »

Il la regarda interloqué.

« Oui, elle est morte. »

La vieille nourrice haussa les épaules.

« Pas possible !

— Puisque je te le dis, un couteau en plein cœur.

— Et moi, je te dis : pas possible.

— Pourquoi ? Comment ? Qu’est-ce que cela signifie ? Tu as une preuve ?

— Cela signifie que je suis sûre qu’elle n’est pas morte… Et une intuition de femme, ça vaut toutes les preuves.

— Et que me conseille ton intuition de femme ?

— De retourner là-bas, de soigner la blessée et de ne pas la quitter, pour la défendre si on l’attaque de nouveau. »

Elle s’interrompit. Un coup de sifflet strident vibrait quelque part dans le parc.

Horace Velmont sursauta, stupéfait.

« Qu’est-ce que cela signifie ? Le signal de Patricia.

— Alors, tout va bien, s’écria Victoire triomphante, tu vois bien qu’elle n’est pas morte et qu’elle a échappé à Maffiano et à ses complices. »

Transfiguré par la joie, Horace se pencha par la fenêtre ouverte et prêta l’oreille.

Au même instant, un rugissement de bête fauve ample et rauque se fit entendre, roula dans l’espace, se prolongea et s’éteignit.

La vieille nourrice instinctivement se signa comme elle eût fait pour le tonnerre.

« C’est la tigresse, dit-elle. Oui, on m’a raconté hier qu’une tigresse s’est échappée, il y a quelques jours, d’une ménagerie ambulante et s’est réfugiée dans ce qu’ils appellent par ici la forêt vierge du château des Corneilles. On a fait une battue, elle a été blessée, ce qui la rend furieuse et plus dangereuse. Si elle rencontre Patricia… »