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Ludovic ne tentait rien. Il n’osait bouger de son arbre, croyant l’avoir offensée. Et elle attendit des jours, vainement, avec une certaine irritation contre le collégien, et, en même temps, une telle crainte de ce qu’il pouvait faire, qu’elle se barricadait la nuit.

Restait la fenêtre, si facile à escalader. Pourquoi ne l’essayait-il pas ? Elle se mit à chanter des chansons ardentes, des hymnes à l’amour, des romances éplorées, pleines de promesses et de serments. Sa voix éperdue déchirait l’espace. Une fois, elle vit des ombres qui se glissaient derrière la ligne des saules. C’étaient des paysans qui avaient pris l’habitude d’assister à ces concerts étranges. Elle dut les interrompre.

Alors, audacieusement, elle descendit dans le jardin noyé d’ombre, et, le cœur serré, elle vint s’asseoir au pied de l’arbre où Ludovic se tenait blotti. Trois soirées s’écoulèrent ainsi, sans un mot, elle en bas,