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s’y regarda longtemps, pensive. Aucune consolation ne lui venait de l’image reflétée. Elle se plut moins que naguères.

Et jour par jour son orgueil décrut. Quelque chose se retirait d’elle qui lui enlevait son fragile bonheur. Et il arriva qu’elle se vit comme autrefois, laide.

Alors elle comprit. Elle comprit la raison de son infortune. Et elle comprit en même temps le mystère de l’âme humaine.

L’illusion est maîtresse du monde. Elle est ondoyante et menteuse. Mais nous ne connaissons qu’elle. C’est l’unique absolu qui soit accordé à nos sens incertains et à nos esprits troubles. La réalité est insaisissable et invisible, et nous ne pouvons pas plus pénétrer jusqu’à elle que nous ne pouvons étreindre la matière à travers les formes qui la revêtent. La réalité, c’est l’illusion présente.