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et lui comprimait le cerveau. Depuis tant d’années il proclamait la suprématie de tous ces gens qu’auprès d’eux il se sentit infime, tout petit garçon, ridicule, emprunté, provincial en un mot. Le fait est que ses tentatives de liaison restèrent infructueuses. On semblait lui rire au nez.

Il se tint à l’écart, vexé. Pour secouer son ennui, il inventa des distractions. Son pas était de soixante-dix centimètres. Il se mit à arpenter des rues, convertissant en mètres le nombre de ses pas et vérifiant son erreur dans le Bottin. Il devint d’une habileté surprenante.

On se lasse de tout. Alcide Chapeau commençait alors à trouver la vie très monotone et Paris dénué d’intérêt. Jusque chez lui, il n’éprouvait qu’échecs et outrages. Ainsi le concierge, cet être évidemment inférieur, le concierge affectait de le connaître à peine. Blessure cuisante, car ce concierge causait avec tous les locataires, potinait avec les bonnes, et la loge retentissait de rires.

Quel précieux allié eût été un pareil personnage ! et quel agent de fusion avec les autres habitants de l’immeuble ! Alcide pensa : « Il faut le conquérir. » Et, chaque jour, il entr’ouvrait la porte et demandait :