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Il serra les poings, comme prêt à la lutte. Contre qui ? Il n’en savait rien. Sûrement pas contre Marc, car il devinait que le jeune homme combattrait à ses côtés. Et l’idée lui vint que cette épreuve les réunissait tous deux dans une commune souffrance. Comme lui, Marc pleurait la perte de leur illusion. Et de tous leurs maux, parmi la détresse de leur bonheur, tous deux ne retenaient que ceci : ils n’étaient rien l’un à l’autre.

Pauvre Marc ! Il eut pitié de sa douleur. Il en oublia la sienne. Comment cicatriser la blessure de l’enfant ?

Allant vers la table, il reprit le revolver. Et il pensait :

« Sa main l’a tenu. Son doigt s’est appuyé sur la gâchette. Seule, la crainte de ma peine l’a empêché. Oh ! mon fils, mon fils, je ne veux pas que tu souffres, je ne veux pas que tu doutes de moi ! »

Et il ne voulait point non plus augmenter son propre mal par un supplice plus grand encore. Alors il réfléchit, les yeux fermés, tenté par un projet qui germait en lui, projet d’abnégation et de miséricorde.

Au bout d’une heure, résolument, il saisit le cahier de Marc, le déploya et écrivit à la suite du journal :

« Mon fils, une explication est nécessaire entre nous. Quand tu auras lu ces lignes, tu viendras me la demander. Je te la donnerai complète. Mais, auparavant, il faut que tu en connaisses les principaux points.