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Séparées, elles redevinrent honnêtes. Instantanément, sans transition, le mal s’arrêta, la source du mal n’existant plus. Le charme secret s’évanouit, qui les obligeait à boire toutes les hontes jusqu’à la lie et à se barbouiller de fange le corps et l’âme. Il ne leur fallut aucune peine pour secouer l’influence inexplicable dont elles avaient subi le joug. Elle se dissipa d’elle-même.

Et leurs bons instincts reparurent, et l’idée du devoir les guida, et de décentes ambitions les hantèrent. Et elles ne comprirent jamais rien à cette période de leur vie — en cela comme en tout, et comme nous tous, les jouets du hasard, du hasard stupide qui fait du vice avec de la vertu, de la vertu avec du vice, du hasard fantasque qui les avait vouées à la turpitude, et qui les rejetait maintenant à leur vertu première.

MAURICE LEBLANC
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