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avoir lues, les lettres qui le concernaient personnellement, annotant les autres, demandes de secours, sollicitations d’entrevues…

Quand il eut fini, il sonna.

— Priez Mlle Levasseur de m’apporter les journaux.

Elle servait naguère de lectrice et de secrétaire au comte roumain et Perenna l’avait habituée à lire dans les journaux tout ce qui le concernait, et à lui rendre, chaque matin, un compte exact de l’instruction dirigée contre Mme Fauville.

Toujours vêtue d’une robe noire, très élégante de taille et de tournure, elle lui était sympathique. Elle avait un air de grande dignité, une physionomie grave, réfléchie, au travers de laquelle il était impossible de pénétrer jusqu’au secret de l’âme, et qui eût paru austère si des boucles de cheveux blonds, rebelles à toute discipline, ne l’eussent encadrée d’une auréole de lumière et de gaieté. La voix avait un timbre musical et doux que Perenna aimait entendre, et, un peu intrigué par la réserve même que gardait Mlle Levasseur, il se demandait ce qu’elle pouvait penser de lui, de son existence, de ce que les journaux racontaient sur son mystérieux passé.

— Rien de nouveau ? dit-il.

Elle lut les informations relatives à Mme Fauville et don Luis put voir que, de ce côté, l’instruction n’avançait guère. Marie-Anne Fauville ne se départait pas de son système, pleurant, s’indignant et affectant une entière ignorance des faits sur lesquels on la questionnait.

Sous les décombres d’un petit chalet…

— C’est absurde, pensa-t-il à haute voix. Je n’ai jamais vu personne se défendre d’une façon aussi maladroite.

— Cependant, si elle est innocente ?

C’était la première fois que Mlle Levasseur formulait une opinion, ou plutôt une remarque sur cette affaire. Don Luis la regarda, très étonné.

— Vous la croyez donc innocente, mademoiselle ?

Elle sembla prête à répondre et à expli-