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— Halte ! ou je fais feu !

C’était Mazeroux, debout déjà, et le revolver au poing, l’expression implacable.

Don Luis s’arrêta, stupéfait. La menace lui était absolument indifférente, et ce canon de revolver braqué sur lui le laissait aussi froid que possible. Mais par quel prodige Mazeroux, son complice d’autrefois, son disciple fervent, son serviteur dévoué, par quel prodige Mazeroux osait-il accomplir un pareil geste ?

Il s’approcha de lui, et, appuyant doucement sur le bras tendu :

— Ordre du préfet, n’est-ce pas ?

— Oui, murmura le brigadier, tout confus.

— Ordre de me retenir jusqu’à son arrivée ?

— Oui.

— Et si je manifestais l’intention de sortir, ordre de m’en empêcher ?

— Oui.

— Par tous les moyens ?

— Oui.

— Même en m’envoyant une balle dans la peau ?

— Oui.

Perenna réfléchit, puis d’une voix grave :

— Tu aurais tiré, Mazeroux ?

Le brigadier baissa la tête et articula faiblement :

— Oui, patron.

Perenna le regarda sans colère, d’un regard de sympathie affectueuse, et c’était pour lui un spectacle passionnant que de voir son ancien compagnon dominé par un tel sentiment du devoir et de la discipline. Rien ne prévalait contre ce sentiment-là, rien, pas même l’admiration farouche, l’attachement en quelque sorte animal que Mazeroux conservait pour son maître.

— Je ne t’en veux pas, Mazeroux. Je