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» J’étais sauvé, puisque précisément cette retraite se creusait du côté où vous étiez en train d’évoluer, et que, obscure elle-même, elle ne projetait dans le puits aucune lumière. Dès lors il me suffisait d’attendre. J’écoutai paisiblement vos discours et vos menaces. Je laissai passer vos projectiles. Et, vous supposant reparti vers Florence, je m’apprêtais à sortir de mon refuge, à revenir à la clarté du jour et à vous tomber sur le dos, lorsque… »

Don Luis retourna l’infirme, comme on fait d’un paquet que l’on ficelle, et il reprit :

— Avez-vous visité, sur les bords de la Seine, en Normandie, le vieux château féodal de Tancarville ? Non ? Eh bien, vous saurez qu’il y a là, hors des ruines du donjon, un ancien puits, qui offre, comme bien d’autres puits de l’époque, cette particularité d’avoir deux orifices, l’un au sommet qui s’ouvre vers le ciel, l’autre un peu en dessous, creusé latéralement dans la paroi et qui s’ouvrait sur une des salles du donjon. À Tancarville, ce second orifice est aujourd’hui fermé par une grille. Ici il fut muré par une couche de cailloux et de plâtre. Et c’est justement le souvenir de Tancarville qui me fit rester, d’autant que rien ne pressait puisque vous aviez eu la gentillesse de m’avertir que Florence ne me rejoindrait pas dans l’autre monde avant quatre heures.

» J’examinai donc mon refuge, et, comme j’en avais eu l’intuition, je constatai que c’était le sous-sol d’une construction aujourd’hui démolie et sur les ruines de laquelle le jardin avait été aménagé. Ma foi, je m’avançai à tâtons, en suivant la direction qui, au-dessus, m’eût mené vers la grotte. Mes pressentiments ne me trompèrent pas. Un peu de jour filtrait