Page:Leblanc - Les Dents du Tigre, paru dans Le Journal, du 31 août au 30 octobre 1920.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sa promenade de long en large, en murmurant :

— Bizarre ! Il y a là une énigme dont je voudrais bien avoir le mot… Cette feuille de papier, ces empreintes de dents… Que signifie toute cette histoire ?

Mais, comme il n’était pas homme à s’attarder longtemps à une énigme dont la solution devait lui être révélée d’un moment à l’autre, puisque l’inspecteur Vérot se trouvait dans la préfecture même, ou aux environs, il dit à son secrétaire :

— Je ne puis faire attendre ces messieurs plus longtemps. Veuillez donner l’ordre qu’on les fasse entrer. Si l’inspecteur Vérot arrive durant la réunion, comme cela est inévitable, prévenez-moi aussitôt. J’ai hâte de le voir. Sauf cela, qu’on ne me dérange sous aucun prétexte, n’est-ce pas ?

Deux minutes après, l’huissier introduisait Me Lepertuis, gros homme rubicond, à lunettes et à favoris, puis le secrétaire d’ambassade, Archibald Bright, et l’attaché péruvien Cacérès. M. Desmalions, qui les connaissait tous trois, s’entretint avec eux et ne les quitta que pour aller au-devant du commandant comte d’Astrignac, le héros de la Chouia, que ses blessures glorieuses avaient contraint à une retraite prématurée, et auquel il adressa quelques mots chaleureux sur sa belle conduite au Maroc.

La porte s’ouvrit encore une fois.

— Don Luis Perenna, n’est-ce pas ? dit le préfet en tendant la main à un homme de taille moyenne, plutôt mince, décoré de la médaille militaire et de la Légion d’honneur, et que sa physionomie, que son regard, que sa façon de se tenir et son allure très jeune, permettaient de considérer comme un homme de quarante ans, bien que certaines rides au coin des yeux et sur le front indiquassent quelques années de plus.

Il salua.

— Oui, monsieur le préfet.

Le commandant d’Astrignac s’écria :

— C’est donc vous, Perenna ! Vous êtes donc encore de ce monde ?