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objet qu’il nous montra. Je fus confondu. C’était le même tableau que j’avais acheté, le même tableau qui se trouvait chez Louise d’Ernemont.

« Il s’agit du terrain que représente cette toile, le clos d’Ernemont, comme on l’appelle ?

— Précisément.

— Eh bien, reprit le notaire, ce clos faisait partie d’un grand jardin que possédait le fermier général d’Ernemont, exécuté sous la Terreur. Tout ce qui pouvait être vendu, les héritiers le vendirent peu à peu. Mais ce dernier morceau est resté et restera dans l’indivision… à moins que… »

Le notaire se mit à rire.

« À moins que ? interrogea Lupin.

— Oh ! c’est toute une histoire, assez curieuse d’ailleurs, et dont je m’amuse quelquefois à parcourir le dossier volumineux.

— Est-il indiscret ?…

— Pas du tout, » déclara Me Valandier qui semblait ravi, au contraire, de placer son récit.

Et sans se faire prier, il commença.


« Dès le début de la Révolution, Louis-Agrippa d’Ernemont, sous prétexte de rejoindre sa femme qui vivait à Genève avec leur fille Pauline, ferma son hôtel du faubourg Saint-Germain, congédia ses domestiques, et vint s’installer, ainsi que son fils, Charles, dans sa petite maison de Passy, où personne ne le connaissait, qu’une vieille servante dévouée. Il y resta caché durant trois ans, et il pouvait espérer que sa retraite ne serait pas découverte lorsque, un jour, après déjeuner, comme il faisait sa sieste, la vieille servante entra précipitamment dans sa