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essayait de retrouver la trace du colonel, elle attendit, toute pantelante d’horreur.

Vers la fin de l’après-midi, on reçut de Ville-d’Avray un coup de téléphone. Au sortir d’un tunnel, après le passage d’un train, des employés avaient trouvé le corps d’un homme affreusement mutilé, et dont le visage n’avait plus forme humaine. Les poches ne contenaient aucun papier. Mais le signalement correspondait à celui du colonel.

À sept heures du soir, Mme Sparmiento descendait d’automobile à Ville-d’Avray. On la conduisit dans une des chambres de la gare. Quand on eut écarté le drap qui le recouvrait, Édith, Édith au Cou-de-Cygne, reconnut le cadavre de son mari.

En cette circonstance, Lupin, selon l’expression habituelle, n’eut pas une bonne presse.

« Qu’il prenne garde ! écrivit un chroniqueur ironiste, lequel résumait bien l’opinion générale, il ne faudrait pas beaucoup d’histoires de ce genre pour lui faire perdre toute la sympathie que nous ne lui avons pas marchandée jusqu’alors. Lupin n’est acceptable que si ses coquineries sont commises au préjudice de banquiers véreux, de barons allemands, de rastaquouères équivoques, de sociétés financières et anonymes. Et surtout, qu’il ne tue pas ! Des mains de cambrioleur, soit, mais des mains d’assassin, non ! Or, s’il n’a pas tué, il est du moins responsable de cette mort. Il y a du sang sur lui. Les armes de son blason sont rouges… »

La colère, la révolte publique, s’aggravaient de toute la pitié qu’inspirait la pâle figure d’Édith. Les invités de la veille parlèrent. On sut les