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mort, est devenu Essarès bey, en attendant qu’Essarès bey, transformé en Siméon Diodokis, jouât le personnage de Siméon Diodokis.

— Oui, murmura Patrice, je vois… Je me rends compte…

Et don Luis continuait :

— Quelles relations existait-il entre les deux hommes ? Je l’ignore. Essarès savait-il auparavant que le vieux Siméon n’était autre que son ancien rival, l’amant de la mère de Coralie, l’homme enfin qui avait échappé à la mort ? Savait-il que Siméon était votre père, c’est-à-dire Armand Belval ? Autant de questions qui ne seront jamais résolues, et qui, d’ailleurs, n’importent point. Mais, ce que je suppose, c’est que ce nouveau crime ne fut pas improvisé. Je crois fermement qu’Essarès, ayant constaté certaines analogies de taille et d’allure, avait tout préparé pour prendre la place de Siméon Diodokis, au cas où les circonstances l’obligeraient à disparaître. Et ce fut facile. Siméon Diodokis portait une perruque et n’avait point de barbe. Au contraire, Essarès était chauve et portait sa barbe. Il se rasa, écrasa à coups de chenet la figure de Siméon, dans cet amas sanglant mêla les poils de sa barbe, habilla le cadavre avec ses propres vêtements, prit pour lui ceux de sa victime, mit la perruque, mit les lunettes et le cache-nez. La transformation était faite.

Après avoir réfléchi, Patrice objecta :

— Soit, voilà pour ce qui s’est passé à sept heures dix-neuf du matin. Mais il s’est passé autre chose à midi vingt-trois…

— Rien…

— Cependant… cette montre qui marquait midi vingt-trois ?

— Rien, vous dis-je. Seulement il fallait