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faire ? S’enfuir ? Mais, en temps de guerre, la fuite est presque impossible. Et puis, s’enfuir, c’est abandonner l’or, et c’est abandonner aussi Coralie, et cela jamais. Alors ? Alors, un seul moyen, disparaître. Disparaître, et cependant rester là, sur le lieu du combat, près de l’or et près de Coralie. Et la nuit arrive, et, cette nuit, il l’emploie à l’exécution de son plan. Voilà pour Essarès. Passons au second personnage, à Siméon Diodokis.

Don Luis reprit haleine. Patrice l’écoutait avidement, comme si chaque parole eût apporté sa part de lumière dans l’obscurité étouffante.

— Celui qu’on appelait le vieux Siméon, repartit don Luis, c’est-à-dire votre père — oui, votre père, car vous n’en doutez pas, n’est-ce pas ? — celui-là en était, lui aussi, au point critique de son existence. Armand Belval, jadis victime d’Essarès avec la mère de Coralie, Armand Belval, votre père, touchait au but. Il avait dénoncé et livré son ennemi, Essarès, au colonel Fakhi et aux complices. Il avait réussi à vous rapprocher de Coralie. Il vous avait envoyé la clef du pavillon. Encore quelques jours et il pouvait croire que tout se terminerait selon ses vœux.

»  Mais, le lendemain matin, à son réveil, certains indices, que j’ignore, lui révélaient la menace d’un danger, et, sans doute, eut-il le pressentiment du projet qu’Essarès était en train d’élaborer. Et lui aussi se posa cette question : Que faire ?… Vous avertir, et même vous avertir sans retard, vous téléphoner aussitôt. Car le temps presse. Le péril se précise. Essarès surveille, traque celui qu’il a choisi une seconde fois comme victime. Peut-être Siméon était-il poursuivi… Peut-être s’était-il enfermé