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qua sur le vieux Siméon. Le silence fut effrayant. Les yeux de Siméon s’étaient fermés, et des gouttes de sueur coulaient sur son visage livide.

À la fin, le bras de l’officier s’abattit, et il articula :

— Je ne peux pas.

— Vas-y donc, ordonna don Luis impatienté.

— Non… Non…

— Mais pourquoi, encore une fois ?

— Je ne peux pas.

— Tu ne peux pas ? Veux-tu que je t’en dise la raison, mon capitaine ? Tu penses à cet homme comme si c’était ton père.

— Peut-être, dit l’officier, tout bas… Les apparences m’obligent à le croire par moments.

— Qu’importe, si c’est une crapule et un bandit !

— Non, non, je n’ai pas le droit. Qu’il meure, mais non pas de ma main, je n’ai pas le droit.

— Alors, tu renonces à te venger ?

— Ce serait abominable, ce serait monstrueux !

Don Luis s’approcha et, le frappant à l’épaule, lui dit gravement :

— Et si ce n’était pas ton père ?

Patrice le regarda. Il ne comprenait pas.

— Que voulez-vous dire ?

— Je veux dire que la certitude n’existe pas, que le doute, s’il s’appuie sur des apparences, ou même sur des présomptions, n’est fortifié d’aucune preuve. Et d’autre part, songe à ton dégoût, à ta répugnance… Car enfin, cela aussi doit être à considérer.