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— Pourtant, il appartenait à quelqu’un, avant de vous appartenir ?

— À ma mère, sans doute.

— Ah ! il vous vient de votre mère ?

— Oui, je suppose qu’il me vient d’elle, au même titre que les différents bijoux qu’elle m’a laissés.

— Vous avez perdu votre mère ?

— Oui. J’avais quatre ans à sa mort. À peine ai-je gardé d’elle un souvenir très confus. Mais pourquoi me demandez-vous cela, à propos d’un chapelet ?…

— C’est à propos de ceci, dit-il, à propos de ce grain d’améthyste qui est cassé en deux…

Il ouvrit son dolman et tira sa montre de la poche de son gilet. Plusieurs breloques étaient attachées à cette montre par une petite châtelaine de cuir et d’argent.

Une de ces breloques était constituée par la moitié d’une boule d’améthyste également cassée vers sa face extérieure, également enchâssée dans des griffes de filigrane. La grosseur des deux boules semblait identique. Les améthystes étaient de même couleur, montées sur le même filigrane.

Ils se regardèrent anxieusement. La jeune femme balbutia :

— Il n’y a là qu’un hasard, pas autre chose qu’un hasard…

— Certes, dit-il, mais admettons que ces deux moitiés de boule s’adaptent exactement l’une à l’autre…

— Ce n’est pas possible, dit-elle, effrayée elle aussi à l’idée du petit geste si simple qu’il fallait faire pour avoir l’indiscutable preuve.