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se reconnaissait incapable d’agir sans son assistance. Et puis, comment oublier que don Luis lui avait sauvé la vie, ainsi qu’à Coralie ?

Les heures passèrent. L’aventurier dormait dans la nuit fraîche. Patrice hésitait, cherchant un plan de conduite qui lui permît d’atteindre Siméon et de se débarrasser de cet ennemi implacable en empêchant don Luis de mettre la main sur l’énorme trésor. Il s’effarait d’être complice. Et pourtant, lorsque les premiers battements du moteur se firent entendre au loin et que don Luis s’éveilla, Patrice était auprès de lui, prêt à l’action.

Ils n’échangèrent aucune parole. Une horloge de village sonna onze heures. La Belle-Hélène avançait.

Patrice sentait grandir son émotion. La Belle-Hélène, c’était la capture de Siméon, les millions repris, Coralie hors de danger, la fin du plus abominable cauchemar, l’œuvre d’Essarès à jamais abolie. Le moteur tapait, de plus en plus près. Son rythme régulier et puissant s’élargissait sur la Seine immobile. Don Luis avait pris les avirons et ramait vigoureusement pour gagner le milieu du fleuve.

Et tout à coup on vit au loin une masse noire qui surgissait dans la lumière blanche. Encore douze ou quinze minutes, et elle était là.

— Voulez-vous que je vous aide ? murmura Patrice. On dirait que le courant vous entraîne et que vous avez du mal à vous redresser.

— Aucun mal, dit don Luis qui se mit à fredonner.

— Mais enfin…