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meurent de faim, il faut des journées entières, trois jours, quatre jours, davantage. Et d’ici là, nous serons secourus.

— Comment ? fit Coralie.

— Comment ? Mais par nos soldats, par Ya-Bon, par M. Desmalions. Ils s’inquiéteront d’une absence qui se prolongerait au-delà de cette nuit.

— Vous l’avez dit vous-même, Patrice, ils ne peuvent pas savoir où nous sommes.

— Ils le sauront. C’est facile. La ruelle seule sépare les deux jardins. Et, d’ailleurs, tous nos actes ne sont-ils pas consignés sur le journal que je tiens, et qui est dans le bureau de ma chambre ? Ya-Bon en connaît l’existence. Il ne peut manquer d’en parler à M. Desmalions. Et puis… et puis, il y a Siméon… Qu’est-il devenu, lui ? Ne remarquera-t-on pas ses allées et venues ? Ne donnera-t-il pas un avertissement quelconque ?

Mais les mots étaient impuissants à les rassurer. S’ils ne devaient pas mourir de faim, c’est que l’ennemi avait imaginé un autre supplice. Leur inaction les torturait. Patrice recommença ses investigations qu’un hasard curieux dirigea dans un sens nouveau.

Ayant ouvert un des livres qu’ils n’avaient pas encore feuilletés, un livre publié en l’année 1895, Patrice aperçut deux pages cornées ensemble. Il les détacha l’une de l’autre, et lut une note qui lui était adressée par son père :

« Patrice, mon fils, si jamais le hasard te met cette note sous les yeux, c’est que la mort violente qui nous guette ne m’aura pas permis de l’effacer. Alors, à propos de cette mort, Patrice, cherche la vérité sur le mur de l’atelier, entre les deux fenêtres. J’aurai peut-être le temps de l’y inscrire. »

Ainsi, à cette époque, les deux victimes