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étaient payées par un notaire habitant l’avenue de l’Opéra. J’ai fait visite à ce notaire et j’ai appris ceci…

Il s’arrêta un moment et déclara :

— Le pavillon a été acheté, il y a vingt et un ans, par mon père. Deux années plus tard, mon père mourait, et ce pavillon, qui faisait donc partie de son héritage, fut mis en vente par le prédécesseur du notaire actuel et acheté par un sieur Siméon Diodokis, sujet grec.

— C’est lui ! s’écria Coralie, Diodokis est le nom de Siméon.

— Or, continua Patrice, Siméon Diodokis était l’ami de mon père, puisque mon père, sur le testament que l’on trouva, l’avait désigné comme légataire universel, et puisque ce fut Siméon Diodokis qui, par l’entremise du notaire précédent et d’un solicitor de Londres, réglait mes frais de pension et me fit remettre, à ma majorité, la somme de deux cent mille francs, solde de l’héritage paternel.

Ils gardèrent un long silence. Bien des choses leur apparaissaient, mais indistinctes encore, estompées, comme ces spectacles que l’on aperçoit dans la brume du soir.

Et une de ces choses dominait toutes les autres. Patrice murmura :

— Votre mère et mon père se sont aimés, Coralie.

Cette idée les unissait davantage et les troublait profondément. Leur amour se doublait d’un autre amour, comme le leur meurtri par les épreuves, plus tragique encore, et qui avait fini dans le sang et dans la mort.