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X.

La cordelette rouge

Coralie avait senti ses jambes fléchir sous elle et elle s’était jetée sur le prie-Dieu, où, ardemment, éperdument, elle priait. En faveur de qui ? Pour le repos de quelles âmes inconnues ? Elle ne savait pas. Mais tout son être était embrasé de fièvre et d’exaltation et les mots seuls de la prière pouvaient l’apaiser.

Patrice lui dit à l’oreille :

— Comment s’appelait votre mère, Coralie ?

— Louise, répondit-elle.

— Et mon père s’appelait Armand. Il ne s’agit donc ni d’elle ni de lui, et pourtant…

Patrice aussi montrait une agitation extrême. S’étant baissé, il examina les dix-neuf couronnes, puis de nouveau la pierre tombale, et il reprit :

— Pourtant, Coralie, la coïncidence est vraiment trop anormale. Mon père est mort en cette année 1895.

— Ma mère est morte également en cette même année, dit-elle, sans qu’il me soit possible de préciser la date.

— Nous le saurons, Coralie, affirma-t-il. Tout cela peut se vérifier. Mais, dès maintenant, voici une vérité qui apparaît. Celui qui entrelaçait les noms de Patrice et de Coralie ne pensait pas seulement à nous, et ne regardait pas seulement l’avenir. Peut-être plus encore songeait-il au passé, à cette Coralie et à ce Patrice dont il savait la mort violente, et qu’il avait pris l’engagement de venger. Venez, Coralie, et que l’on ne puisse pas soupçonner que nous sommes venus jusqu’ici.

Ils redescendirent le sentier et franchirent les deux portes de la ruelle. Personne ne les vit rentrer. Patrice conduisit aussitôt Coralie chez elle, recommanda à Ya-