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Mais le lendemain de cet enterrement, à la suite de quelques démarches effectuées par le capitaine Belval auprès de l’autorité militaire, avec l’appui de la préfecture, un nouvel ordre de choses fut établi dans la maison de la rue Raynouard. Reconnue comme annexe numéro deux de l’ambulance des Champs-Élysées, elle devint, sous la surveillance de Mme Essarès, la résidence exclusive du capitaine Belval et de ses sept mutilés.

Ainsi, Coralie demeura là toute seule. Plus de femme de chambre ni de cuisinière. Les sept mutilés suffirent à toutes les besognes. L’un fut concierge, un autre cuisinier, un autre maître d’hôtel. Ya-Bon, nommé femme de chambre, se chargea du service personnel de maman Coralie. La nuit, il couchait dans le couloir, devant sa porte. Le jour, il montait la garde devant sa fenêtre.

— Que personne n’approche ni de cette porte, ni de cette fenêtre ! lui dit Patrice. Que personne n’entre ! Si seulement un moustique réussit à pénétrer près d’elle, ton compte est réglé.

Malgré tout, Patrice n’était pas tranquille. Il avait eu trop de preuves de ce que pouvait oser l’ennemi pour croire que des mesures quelconques fussent capables d’assurer une protection absolument efficace. Le danger s’insinue toujours par où il n’est pas attendu, et il était d’autant moins facile de s’en garer qu’on ignorait d’où venait la menace. Essarès bey étant mort, qui poursuivait son œuvre ? Et qui reprenait contre maman Coralie le plan de vengeance qu’il annonçait dans sa dernière lettre ?