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JULOT RACONTE…

espoir : c’est que le scandale passe sans t’atteindre. Après quoi, je peux mourir.

Attendri une seconde, il lâcha son volant d’une main, qu’il tendit pour presser celle de Dominique. Il avait été secoué d’un frisson à l’idée de la mort qu’elle évoquait. Mais au fond, cette femme qui était là, près de lui, lui faisait horreur. Il avait honte qu’elle fût son épouse. Il ne cessait de penser avec un dégoût révolté, aux révélations de Jules Caboche. Il avait commis une faute lui-même ?… Qu’importe ! Il ne pensait qu’à celle de Dominique !…

Soudain, semblant s’éveiller, Dominique regarda par la portière ouverte, vit des arbres, de l’ombre et des lumières. On était dans le Bois.

— Où nous conduis-tu, Patrice ? Nous rentrons, n’est-ce pas ?

— Oui, répondit-il faisant obliquer la voiture vers la droite.

— Mais ce n’est pas le chemin de la maison ? reprit la jeune femme au bout de quelques minutes.

— Non, répondit Patrice. Nous faisons un détour avant de rentrer. Antoine, il y a un moment, m’a invité à venir avec toi passer une heure chez lui. Un souper pour lequel il a réuni quelques amis.

Et Patrice, d’un ton singulier, ajouta :

— Antoine m’a prévenu. Il y aura, avant le souper, une représentation, des numéros amusants.

— Je n’ai pas le cœur à souper, protesta Dominique qui n’avait pas entendu la dernière phrase.

Patrice insista :

— Mais si, viens, ça te changera les idées ! Et nous rentrerons quand tu le voudras.

Dans un des nouveaux immeubles bâtis, entre la Porte d’Auteuil et la Porte Dauphine, sur l’emplacement des anciennes « fortifs », chères aux chansonniers réalistes d’il y a cinquante ans, Antoine habitait un vaste atelier que surmontait son appartement personnel où l’on accédait par un petit escalier intérieur.

De l’atelier, il avait fait un théâtre, comme le Grand-Guignol fut aménagé dans l’atelier d’un peintre célèbre de la fin du dernier