Page:Leblanc - Le Scandale du gazon bleu, 1936.djvu/38

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
36
LE SCANDALE DU GAZON BLEU

courant de l’après-midi, ses déclarations furent confirmées, et sur certains points complétées, par divers gens qui avaient, la veille, dîné et passé la soirée à l’Auberge du Gazon Bleu.

En particulier un groupe de lads et d’entraîneurs de Maisons-Laffitte, lesquels avaient remarqué la Pierreuse et ses compagnons, affirmèrent avoir déjà vu, à plusieurs reprises, les deux femmes élégantes qui s’étaient jointes à Julot et à sa compagne, dans certains bals, aux fort libres allures, des environs et aux bords de la Seine.

Toutes deux ne se quittaient jamais et formaient en quelque sorte un ménage. Elles étaient connues dans la région où leurs danses gracieuses et indécentes avaient un grand succès. On ignorait leurs noms, mais on les appelait les Colombes. Peu sensible à cette poétique appellation la police, ayant eu vent de leurs exhibitions contraires aux bonnes mœurs et stricte morale les recherchait depuis quelque temps déjà.

Les premières éditions des journaux de l’après-midi donnèrent, avec quelques premiers détails, l’information concernant la « femme morte du Gazon Bleu » ; les dernières éditions, paraissant vers cinq heures du soir, reproduisirent les déclarations du sieur Dorlodoux et les témoignages des lads.

Enfermés chez eux, l’un dans son cabinet de travail, l’autre dans la chambre, Patrice et Dominique lurent séparément ces éditions du soir que Patrice était lui-même descendu acheter, ne voulant pas confier ce soin à la femme de chambre, dans la crainte d’attirer son attention par cette acquisition inusitée de nombreux journaux.

Quand il eut terminé sa lecture Patrice rejoignit Dominique. Il réprimait une violente agitation, son visage était pâle et décomposé. Dominique pâlit à son tour et lui demanda d’une voix tremblante :

— Qu’y a-t-il encore ?

Il répondit sourdement :

— Tu n’as pas lu en dernière minute ?

— Quoi donc ?