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LE SCANDALE DU GAZON BLEU

— Du moins, j’y touche presque…

— Vous avez des preuves ? demanda Patrice, sans regarder son interlocuteur.

— Oui, mon cher maître, j’ai des preuves. D’abord la présence de Jules Caboche à bord du même bateau que vos amis, le Georges-Washington, et le rôle qu’il y jouait.

— Quel était ce rôle ?

— Celui de domestique de messieurs Ganet et L’Heurois. Ce rôle, disait-il, une fois à terre il le changerait en celui de chauffeur amené de Paris tout exprès pour piloter l’auto que ses patrons comptaient acheter dès leur débarquement.

— De qui tenez-vous ces renseignements ?

— De Jules Caboche lui-même.

— Il a donc consenti à vous faire des confidences ?

— Il a bien fallu. Ils savent y faire, les inspecteurs de là-bas… Et on avait découvert dans la malle de Caboche cent billets de mille dissimulés entre le linge. Il a bien fallu qu’il avoue…

— À qui il les avait volés ?

— Volés ? non. On les lui avait donnés.

— Qui ?

— Monsieur Richard L’Heurois, avant le départ de France.

— Ah ? Et Antoine Ganet n’avait pas pris part à cette largesse ?

— Non. Monsieur Antoine Ganet s’en foutait, de tout ça. « En voilà des chichis pour pas grand’chose, » qu’il disait, à ce que prétend Caboche. « Quoi, pour une partouse, s’expatrier, c’est suffisamment fourneau… en plus cracher cent billets, non, mais des fois ? Tout ça c’est oublié, ça n’a pas d’importance, que ceux qui restent en France se débrouillent. Moi, du jour où je me suis donné de l’air, j’ai rayé tout ça de mes tablettes. Ni vu, ni connu ! » Et il blaguait monsieur L’Heurois de ce qu’il appelait son poirisme,

Patrice eut un sourire un peu amer. Il mesurait la différence d’âme entre ses deux amis. Il dit :

— Et à quelle condition monsieur L’Heurois a-t-il donné cet argent au sieur Caboche ?

— À la condition que celui-ci restituerait le collier de perles de