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LE SCANDALE DU GAZON BLEU

— Excusez ma hardiesse, ma lettre, ma visite clandestine, dit-il. Il faut que je vous parle, sans témoin, Dominique.

— Appelez-moi madame, dit-elle sèchement.

Il eut un haut-le-corps.

— Mais… je vous appelle bien Dominique en présence de votre mari !

— Justement il n’est pas là.

— Il sera là tout à l’heure, aux environs de minuit, il me l’a dit à Paris ce matin.

— Vous l’avez vu à Paris ? Et il sait que vous venez ici ? Il connaît le motif de votre visite ?

— Non. Non.

— Pourquoi ? Quel est ce nouveau mystère ? Que venez-vous faire que Patrice doive ignorer ?

— Vous le lui apprendrez si vous le jugez à propos… Mais nous ne pouvons rester sur ce balcon, on peut nous voir, nous entendre. Laissez-moi entrer dans votre chambre.

Et il ajouta d’un ton légèrement moqueur :

— Vous vous défiez de moi ?

Dominique était brave, elle avait confiance en elle. Elle ne voulait pas avoir l’air de rien craindre… et du reste, vraiment, qu’avait-elle à craindre ?

Elle écarta davantage les persiennes, le précéda dans la pièce et, quand il eut passé, repoussa les contrevents.

Alors, sans prendre un siège, il lui dit :

— J’ai habité cette chambre à l’époque des chasses il y a deux ans, elle est isolée, sans voisin immédiat, n’est-ce pas ?

— En effet.

— Je vous remercie encore une fois d’avoir confiance en moi et de me recevoir à cette heure de la nuit.

— Vous m’avez promis d’alléger ma peine, je vous accueille comme un libérateur.

— Votre peine est donc encore bien grande ? Pourtant le souvenir doit être moins âpre, puisqu’aucun scandale ne vous menace plus.

— C’est vrai, dit-elle sourdement. Pour le monde, je suis sauve,