Page:Leblanc - Le Scandale du gazon bleu, 1936.djvu/114

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
LE SCANDALE DU GAZON BLEU

— Monsieur le brigadier Delbot, annonça le domestique qui s’effaça.

Patrice saisit le revolver et le braqua sur Dominique.

— Ça y est, Delbot ? C’est l’arrestation ?

— Tonnerre de D…, cria l’inspecteur, en lui saisissant le bras.

— Un répit alors ? Tout ne va pas comme vous voulez ? Que s’est-il donc passé ? acheva Patrice, railleur…

— Vous en avez de la veine ! répondit Delbot rageur.

— De la veine. Nous ? Mais Julot a déposé contre nous ? devant témoins ? Il a signé sa déposition ?

— Il n’a ni parlé ni signé. Quand je l’ai cueilli chez votre copain Richard il a demandé qu’on le détache pour causer plus à l’aise et vlan ! il m’a démoli la figure d’un coup de poing, et il a sauté par la fenêtre.

— Vous ne l’avez pas repris ?

— Si, mais mort. Cet imbécile d’Andermatt lui avait fichu une balle dans les reins.

— Et Julot supprimé, vous n’avez plus aucune preuve ? Alors que venez-vous faire ici ?

Delbot ne répondit pas. Il comprenait sa défaite et ne s’y résignait pas. C’est pour cela qu’il était venu, il voulait prouver à l’ennemi qu’il ne désarmait pas.

Patrice respirait, ivre de joie contenue. Dominique, dans la réaction du salut inespéré, pleurait.

Delbot, soudain se redressa, se ressaisissant :

— Après tout, on se passera de Julot. Au fond, il me l’a confié son témoignage. Et ça suffit. Mon cher maître, la Justice a toujours le dernier mot. C’est la règle de ma vie, ma religion… la Justice !… la Justice !…

— La justice demande des preuves, observa Patrice sèchement. Monsieur Delbot, je ne vous retiens pas.

Il était tard. Ce ne fut que le lendemain matin que le brigadier put, au Palais, voir le juge d’instruction. Il espérait, malgré tout, obtenir son mandat d’arrêt. Le magistrat s’y refusa péremptoirement. L’après-midi, poussé par une impulsion de haine aveugle, il retourna au quai de Passy. Les Martyl venaient de quitter Paris