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— Et Pasquarella ? demanda Nathalie.

— Elle a reçu de sa mère de meilleures nouvelles sur l’état d’esprit de sa sœur. D’autre part, elle n’a pas le courage de frapper Ellen-Rock. Elle est donc retournée en Sicile. Ainsi, je vous le répète, pas d’importuns à craindre. Nous avons le champ libre. En une heure ou deux, j’éclaircirai la situation.

— C’est-à-dire ?

— C’est-à-dire que nous saurons si Ellen-Rock est de ce pays et ce qu’il fut autrefois.

C’était un dimanche. À neuf heures du matin, ils franchissaient la grille et pénétraient dans le donjon dont la porte semblait n’être jamais close. Ils y trouvèrent le vieux Geoffroi en train d’épousseter la salle des gardes. Il les accueillit sans plus d’attention ne de curiosité que la première fois, et leur dit avec enjouement et une conviction qui correspondait à ses obscures pensées :

— Il y a une demie-lieue jusqu’à l’église de Plouvanec’h, une lieue et demie jusqu’à la mer, et trois quarts de lieue jusqu’à la gare. Quant aux traces de pas, j’en ai encore repéré dans les ruines, mais ils ne sont plus que deux. Au prochain clair de lune, je leur fiche un coup de fusil.

Maxime l’interrogea, mais Geoffroi était dans ses heures de lubie, car il répondit d’abord à l’envers. Ce n’est qu’au bout d’un moment qu’il murmura, en se touchant le front :

— Excusez, mon bon monsieur… la tête n’est pas bien solide. Il faudra parler de ça à mademoiselle Armelle.

— Elle va donc venir ?

— Elle vient. Je l’entends.

Il parut se réveiller tout d’un coup et, trottinant jusqu’au palier, il écouta. Les mêmes paroles qu’au premier jour furent échangées. D’en bas, la voix féminine cria :

— Personne ?

— Non, mademoiselle Armelle.

— Il n’est pas là ?

— Non.

— Pas de nouvelles ?

— Aucune.

— Ce sera pour demain.

— Espérons-le, mademoiselle Armelle. Mais comme vous voilà toute rose !

— J’ai marché plus vite. C’est dimanche aujourd’hui, et je veux aller avec toi à la messe du village. Tiens, Geoffroi, voici des fleurs de mon jardin.