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— Ma dernière ressource ?

— Vous êtes au bout du rouleau. Que l’on examine vos comptes comme ancien fondé de pouvoir de M. Manolsen — qui, hélas ! se confiait entièrement à vous — puis comme directeur-gérant de la firme, et c’est la prison pour vous, et le déshonneur peut-être pour la mémoire de M. Manolsen.

Nathalie balbutia :

— Que dites-vous ?

— Des mensonges, Nathalie ! s’écria Forville, pas un mot n’est vrai de toutes ces infamies. Il m’accuse par vengeance pour me nuire dans votre esprit.

— Parlez, dit la jeune fille à Ellen-Rock.

Elle se rendait compte maintenant que l’entretien arrivait à sa phase la plus grave. Le reste n’était que préambule.

— Je m’excuse, dit-il, des révélations que je vais vous faire, car elles sont assez pénibles à entendre. Mais il le faut. Voici. La maison Manolsen, fondée par votre père, possède, en dehors de son siège social de Paris, des comptoirs dans les grandes villes de France et d’Europe, comptoirs où affluent, où affluaient plutôt, toutes les marchandises exportées en Amérique. Or, d’après les investigations de Maxime, derrière cette organisation puissante que M. Manolsen avait créée par son propre génie, il existait, durant les dernières années de sa vie, et il existe encore, toute une entreprise clandestine pour expédier à l’étranger des marchandises dont la provenance est délictueuse… disons le mot, dont la provenance est le vol.

Nathalie sursauta.

— Mais c’est impossible !… Une telle ignominie…

Forville s’était croisé les bras, affectant l’indignation. Il était très pâle. Il bredouilla :

— Une preuve… au moins une preuve.

— Un exemple d’abord, dit Ellen-Rock. Le service d’antiquités de la maison Manolsen était centralisé à Versailles, non loin d’ici, dans un grand garage. Or, la partie postérieure de ce garage est devenue, à l’insu de M. Manolsen, une remise pour autos dérobées, que l’on recèle et que