Page:Leblanc - Le Bouchon de cristal, paru dans Le Journal, 25-09 au 09-11-1912.djvu/95

Cette page a été validée par deux contributeurs.

émotion exaspérait, elle vécut là quelques jours d’accablement physique et d’inconscience. Elle ne pensait plus à rien. La lecture des journaux lui était défendue.

Or, un après-midi, alors que Lupin, changeant de tactique, étudiait le moyen de procéder à l’enlèvement et à la séquestration du député Daubrecq, alors que Grognard et Le Ballu, auxquels il avait promis leur pardon en cas de réussite, surveillaient les allées et venues de l’ennemi, alors que tous les journaux annonçaient la comparution prochaine devant les Assises des complices d’Arsène Lupin, tous deux accusés d’assassinat — un après-midi, vers quatre heures, une sonnerie brusque retentit dans l’appartement de la rue Chateaubriand.

C’était le téléphone.

Lupin décrocha le récepteur.

— Allô ?

Une voix de femme, une voix essoufflée articula :

M. Michel Beaumont ?

— C’est moi, madame. À qui ai-je l’honneur…

— Vite, monsieur, venez en toute hâte, Mme Mergy vient de s’empoisonner.

Lupin ne demanda pas plus d’explications. Il s’élança de chez lui, monta dans son automobile et se fit conduire à Saint-Germain.

L’amie de Clarisse l’attendait au seuil de la chambre.

— Morte ? dit-il.

— Non, la dose était insuffisante. Le médecin sort d’ici. Il répond d’elle.

— Et pour quelle raison a-t-elle tenté ?…

— Son fils Jacques a disparu.

— Enlevé ?

— Oui, il jouait à l’entrée de la forêt. On a vu une automobile s’arrêter… deux vieilles dames en descendre. Puis il y eut des cris. Clarisse a voulu courir, mais elle est tombée sans forces, en gémissant : « C’est lui… c’est cet homme… tout est perdu. » Elle avait l’air d’une folle. Soudain, elle a porté un flacon à sa bouche, et elle a bu.

— Ensuite ?