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l’étreignait, maintenant que le duel s’engageait avec cet adversaire dont il connaissait l’effrayante supériorité, et il frissonnait à l’idée qu’Arsène Lupin, le formidable Arsène Lupin, était en face de lui, calme, paisible, poursuivant son but avec autant de sang-froid que s’il eût eu entre les mains toutes les armes, et qu’il se fût trouvé devant un ennemi désarmé.

N’osant encore l’attaquer de front, presque intimidé, Prasville dit :

— Ainsi, Daubrecq vous l’a livrée ?

— Daubrecq ne livre rien. Je l’ai prise.

— De force, par conséquent ?

— Mon Dieu, non, dit M. Nicole en riant. Ah ! certes, j’étais résolu à tout, et lorsque ce bon Daubrecq fut exhumé par mes soins de la malle où il voyageait en grande vitesse, avec, comme alimentation, quelques gouttes de chloroforme, j’avais préparé la chose pour que la danse commençât sur l’heure. Oh ! pas d’inutiles tortures… Pas de vaines souffrances… Non… La mort simplement… La pointe d’une longue aiguille qu’on place sur la poitrine, à l’endroit du cœur, et que l’on enfonce peu à peu, doucement, gentiment. Pas autre chose… Mais cette pointe, c’était Mme Mergy qui l’aurait dirigée… Vous comprenez… une mère, c’est impitoyable… une mère dont le fils va mourir !… « Parle, Daubrecq, ou j’enfonce… Tu ne veux pas parler ? Alors, je gagne un millimètre… et puis un autre encore… » Et le cœur du patient s’arrête de battre, ce cœur qui sent l’approche de l’aiguille… Et puis un millimètre encore… et puis un autre encore… Ah ! je vous jure Dieu qu’il eût parlé, le bandit ! Et, penchés sur lui, nous attendions son réveil en frémissant d’impatience, tellement nous avions hâte… Vous voyez ça d’ici, monsieur le secrétaire général ? Le bandit couché sur un divan, bien garrotté, la poi-